L'histoire de la photographie se joue et se déjoue souvent entre réalité et mensonge, document et artifice, dans une ambivalence permanente qui questionne et construit la relation que le photographe entretient avec son appareil. Si Cindy Sherman incarne les nombreux sujets de ses séries photographiques, elle se défend systématiquement de faire de la photographie un outil autobiographique: « Je me sens anonyme dans mon travail, dit-elle, quand je regarde les images, je ne me vois jamais moi. (…) Parfois, je disparais. » Cette disparition du « je » en faveur d'une série de portraits archétypaux et universels se retrouve dans l'œuvre de Johanna Benaïnous et Elsa Parra. Dans leur première série photographique A couple of them (2014-2015), qui comprend plus de 72 portraits et une vidéo, le spectateur croit se trouver face à une galerie de portraits bien avant de comprendre qu'il s'agit des mêmes modèles, les deux photographes, déclinés en une véritable typologie générationnelle. Elsa et joanna newsom. Au premier abord, leur travail semble révéler un kaléidoscope d'individualités, portraits capturés au long des villes et des contextes.

  1. Elsa et joanna newsom

Elsa Et Joanna Newsom

Je ne sais pas pourquoi, mais c'était une pratique que je cachais. Or quand je suis arrivée à la Cambre à Bruxelles, je me suis dit, c'est bon c'est mon médium. Pour les Arts Déco, j'avais proposé un dossier de scénographie, ce qui n'a rien à voir avec ce que je fais aujourd'hui. Et la photo m'a paru évidente. C'était pour moi le moyen le plus concret d'exprimer mes idées. Johanna: Moi j'ai commencé la photo par ennui! Elsa & Johanna | Accueil | Collection Société Générale. Ma mère avait un vieil Olympus numérique basse définition. Je me rappelle, j'étais avec ma meilleure amie, je passais un mois d'été à la campagne et on s'ennuyait… Et en fait pendant quatre ans on a tenu ce blog et c'est devenu une passion. On passait tout notre libre à faire des excursions photos. Et moi j'ai continué. C'est devenu complètement évident. Qu'est-ce qui vous inspire? Elsa: New York a été un déclic. Là-bas, on a beaucoup observé les gens: cette ville est un théâtre ouvert! On s'est tellement amusées à prendre des cafés en terrasse pendant des heures pour regarder les gens.

« Temptation », Beyond the shadows, © Elsa & Johanna Un mois d'immersion sera nécessaire pour repérer les décors, qui à leur tour inspireront des scènes. Il faudra alors les incarner à grand renfort d'accessoires dénichés dans des friperies, et à grand renfort d'attitudes lascives où la mélancolie se confond avec l'ennui. Elles X Paris Photo, un parcours dédié aux femmes : Elsa et Johanna. « Nous sommes comme des éponges qui absorbent les paysages et qui, dès qu'on les presse, crachent un liquide coloré », résument-elles. « Evening Cleaning », Beyond the shadows, © Elsa & Johanna Chroniques de l'attente ordinaire et de l'ennui collectif On aimerait que quelque chose se trame et se prépare. Que ces intérieurs ordinaires soient les murs du début d'une intrigue policière et mystérieuse à la Fargo. Mais non, on attend, encore et encore, tout comme les deux personnages de « Beyond the Shadows » qui peuplent les parkings, les cours de récré et les pavillons de Calgary. Devant la TV ou devant un évier, dans l'eau chlorée d'une piscine vide ou le confort oppressant d'un fauteuil rapeux.

July 31, 2024, 9:10 am